vendredi 25 octobre 2013

Chère Line,
Me revoici devant toi, déléguant une feuille pour exprimer ce vide. Ma plume arpente un papier aride et son encre se vide comme mon sang, comme des larmes que je veux bien verser en ta mémoire. On ne pleure pas les jours heureux. Ce n’est plus mon infraction si les heures n’ont pas atteint le nombre magique constituant le jour. Si je suis là à penser à toi, c’est pour me baigner dans un monde où tu m’avais toi-même enfoui et que je refuse de laisser. Hier encore, dans ma mémoire, j’ai essayé de tout refaire. J’ai tenté à la mesure du possible de créer des doléances à tes yeux, un monde où nous deux sauraient faire de l’amour le crédo de notre vie et de la passion l’unique rêve associé à l’existence. Le temps est venu et t’as apporté loin de moi, dans une contrée où ma lune ne brille pas et où il m’est impossible d’espérer. Chère Line, ce matin le soleil se lève sans toi, et tes cheveux lisses et dorés se sont dérobés de mes mains pour disparaître à jamais. Et moi, je reste là dans mon recoin sans horizon à aimer sans voir, à aimer sans espoir, à aimer encore. J’essaie de garder la face, de rester ferme et de tenir bon devant l’adversité dans laquelle me laisse cette fin inattendue. J’ai souri avec des joues qui ne se pliaient pas. J’ai souri alors que tout ce que j’estimais avoir de meilleur était parti. J’ai souri dans mon impuissance devant le destin, devant le pire en me faisant croire que rien de mal n’était arrivé. Et aujourd’hui, je suis bien à bout, à bout de cacher mon vrai visage sous un masque de jovialité, alors qu’au fond le sinistre règne. J’ai arraché tout ce qui me restait de ma mémoire, j’ai voulu changer de visage et de tout pour m’éloigner de ton image qui me revient chaque soir dans mes songes cachés. J’ai guetté des songes à la mesure de ton image et j’ai vécu l’espace d’un clignement qu’a duré le moment où j’ai appris à te connaître. J’ai rêvé dans l’ombre de l’espoir que demain nous apportera paix et allégresse au milieu de cette terre blanche que tu as bien voulu me donner comme patrie. J’ai été un aspirant, qui s’est donné la peine d’ancrer tout de toi en lui, le temps de se forger une silhouette semblable à la tienne, par la force de l’amour et par le pouvoir de penser. Comme Manuel, mon héros, j’ai cru en l’avènement d’un jour où ton soleil brillera que sur ma tête sans faire place à l’obscurité. Comme Manuel, mon héros, j’ai combattu jusqu’au bout. Comme Manuel, mon héros, je laisse à ceux qui viendront le soin de me rendre une gloire, car je serai parti dans une contrée éloignée quand peut-être tu citeras à nouveau mon nom. Et quand décembre reviendra avec sa pluie, je retiendrai encore entre mes mains tremblantes de peur et grelottantes de froid la jolie parapluie brune que j’ai égarée dans un coin que j’ignore. Elle nous protègera de l’impact de ces gouttes qui veulent tomber sur nos joues pour cacher nos larmes versés abondamment devant le départ inattendu et inéluctable qui arrive. Le lendemain n’a pas connu ton image. Car tout comme moi, il n’est pas doué de vision. Le lendemain n’a jamais connu la douceur de tes cheveux car tout comme moi, il n’est pas doué de toucher. Le lendemain est lâche. Il a couru à travers les plaines et crié sans pour autant se battre afin d’obtenir ce à quoi il s’aspire. Mon lendemain a reconnu ses faiblesses et a compris que l’homme peut avoir uniquement ce qu’il mérite et non tout ce qu’il veut.
Au moment où ma plume fait signe de fatigue, je veux retourner là où tu m’as connu, dans cet espace clos où toute voix humaine se réduit à ton murmure, faisant frémir tout mon être. Je reprendrai la douce cadence de tes pas sous le rythme d’un rock’n roll que j’ai acquis de toi. Je l’apprendrai et j’attendrai dans l’espoir que ta dernière chandelle revienne illuminer ma vie.
Jeiel Onel Junior Mezil
Chroniqueur et blogueur